mardi 22 janvier 2013

Der Fliegende Holländer
Acte 1
Scène 2
L'irruption du mystère

La deuxième scène, selon un art déjà très wagnérien, contraste avec la précédente. Du vaisseau fantôme descend le capitaine, celui que l'on nomme le Hollandais volant. Wagner, dans ses "notes" sur l'oeuvre, insiste sur l'importance de la scène. Il souligne, en particulier, que l'allure hésitante du personnage sur la terre ferme doit s'opposer à la vitesse folle de son bateau. Des sonorités graves, sépulcrales, interrompues de coups sourds, annoncent sa confession.
Celle-ci, qui occupe toute la scène, se divise en quatre parties.
Le Hollandais dit d'abord que le délai est expiré, qu'une fois de plus sept ans se sont écoulés, qu'avec dépit la mer le rejette sur terre. Puis, la tête à demi-tournée vers le large, il interpelle l'océan, l'informe qu'il le reprendra bientôt mais qu'il lui occasionne finalement une paix éternelle. La tête maintenant baissée sous l'effet de la fatigue, reconnaît qu'il ne trouvera jamais à terre ce qu'il cherche. Enfin, invoquant toujours les flots, il leur crie qu'il leur sera fidèle jusqu'au jour où se brisera et se tarira le dernier d'entre eux.
C'est un récitatif pathétique, où alternent les évocations de la terre puis de la mer, chaque fois ponctuées par les sonorités graves et les coups sourds du début et s'achevant dans un déchaînement de l'orchestre lorsqu'il s'agit de l'ultime vague.
Vient un air en do mineur où le Hollandais dit son errance et sa volonté d'en finir. Ah! combien de fois il s'est jeté en vain dans les abîmes, sur les rochers, voire dans les griffes des pirates qui s'enfuyaient à sa vue, en se signant.
Une fois de plus, il évoque les abîmes, les rochers, son impossibilité de trouver une tombe et la mort, reconnaissant dans cela la marque de la damnation.
La voix du Hollandais est rapide, oppressée, sans cesse coupée par le fracas des trompes, tandis que l'orchestre, en ses chromatismes, traduit on ne sait quel mouvement de vagues aller et retour, image de l'impuissance de l'homme.
Puis a lieu une grave imploration, sur un ton à la fois sombre et héroïque. Le Hollandais s'adresse à "l'ange béni de Dieu". Il lui remémore la chance de salut qu'il lui a obtenue et il se demande à présent et par deux fois, s'il n'y a pas là une moquerie. Se redressant avec rage, sur le mode récitatif qui a ouvert la confession, le Hollandais se résout à  accepter que ce n'est pas la moquerie espérée. Le malheureux songe qu'il n'a plus qu'un espoir: le moment où la Terre ayant achevé son cycle vital, disparaîtra et que le jour du Jugement dernier adviendra.

Commentaire.
Gaston Bachelard s'appuyant sur de grands poètes et de grands écrivains, voient dans "l'eau violente", dans l'eau déchaînée par l'ouragan, une affinité avec la puissance de l'homme. Ainsi la tempête autour d'un cap a-t-elle poussée notre Hollandais à désirer la vaincre.
Toutefois, au niveau de l'errance qui en est résultée, les considérations de Bachelard sur "l'eau violente" ne peuvent plus nous éclairer: n'est-il pas dit que le bateau du Hollandais, pour avancer, se passe des vents et ignore les vagues? Nous avons donc à évoquer d'autres images: celle -par exemple- des Danaïdes, tenues d'emplir un tonneau sans fond, ou celle de Sisyphe et son rocher, d'où, dans les deux cas un effort gratuit ininterrompu et une image parfaite de l'absurde.
Notre Hollandais, lui, est sur les flots qui ne le conduisent à aucune attache, à aucun foyer. Le pénible pour lui provient de ce que l'océan fait partie d'un espace qui n'est plus ordonné au centre. Le damné n'ayant plus de but, l'onde est ce lieu où tous les endroits se valent, où aucun n'est situé sur un trajet impliquant un départ et une arrivée.





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